Agent immobilier, DPE et responsabilité

Agent immobilier : DPE, responsabilité et point de départ du délai de prescription

Publié le : 14/11/2025 14 novembre nov. 11 2025

La Cour de cassation dans un arrêt du 25 septembre 2025 illustre avec netteté son exigence quant à la détermination du point de départ de la prescription quinquennale de l’article 2224 du Code civil, appliquée à l’action en responsabilité contre un agent immobilier.
Cass. 3e civ., 25 septembre 2025, n° 24-12.596

Les acquéreurs d’un chalet, confrontés à d’importants défauts d’isolation, avaient assigné notamment l’agent immobilier en invoquant un diagnostic de performance énergétique (DPE) erroné découvert au cours d’une expertise judiciaire. La Cour d’appel avait déclaré leur action prescrite, considérant que les acheteurs avaient eu connaissance du dommage dès le premier hiver suivant la vente (2014/2015). Elle en avait déduit que l’action engagée en 2020 puis en 2022 était tardive car elle aurait dû intervenir en 2019.

La Cour de cassation censure cette analyse. Elle rappelle le principe désormais constant : le délai de prescription court non pas à la seule connaissance du dommage, mais à la connaissance cumulée du dommage, du fait générateur fautif, de son auteur, et de l’existence d’un lien causal (Ch. mixte, 19 juillet 2024).

Or, la Cour d’appel de Besançon avait limité son raisonnement à la découverte du seul dommage (défaut d’isolation), sans rechercher la date à laquelle les acquéreurs avaient eu connaissance de la fausseté du DPE transmis par l’agent immobilier, c’est-à-dire du fait générateur propre à engager la responsabilité de celui-ci. Or, cette information n’était apparue qu’avec le pré-rapport d’expertise judiciaire de 2019.

La Cour impose donc une analyse individualisée du point de départ de la prescription pour chaque défendeur, en fonction du manquement spécifique reproché. Le simple constat d’un défaut de construction ne suffit pas à enclencher le délai à l’égard d’un agent immobilier si le lien entre le dommage et son manquement n’est pas encore connu.

L’arrêt présente un intérêt majeur pour les praticiens :

Il confirme la nécessaire intégration du DPE dans les obligations d’information et de conseil de l’agent immobilier.

Il rappelle que la prescription ne commence que lorsque l’acquéreur dispose d’un faisceau d’éléments lui permettant d’identifier la faute précise imputable au professionnel.

Il permet de contrecarrer les fins de non-recevoir prématurées en démontrant que la simple découverte d’un désordre ne suffit pas.

La cassation totale renvoie donc l’affaire devant une autre composition de la Cour d’appel de Besançon, invitée à rechercher la date réelle à laquelle les acquéreurs ont eu connaissance du caractère erroné du DPE.

Cet arrêt renforce la protection des acquéreurs et impose aux juges du fond une analyse rigoureuse et contextualisée de la prescription, particulièrement en matière de diagnostics et d’obligations professionnelles.

Quant à l’agent immobilier, le fait de transmettre un diagnostic erroné engage sa responsabilité. Il doit vérifier au moins la cohérence du document transmis. C’est le rôle d’un professionnel. 


Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

MEDINA Jean-Luc
Avocat Associé
CDMF avocats , Membres du conseil d'administration, Arbitres
GRENOBLE (38)
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