Harcèlement au travail

Harcèlement moral : l’absence de faits avérés de harcèlement ne prive pas le salarié de faire valoir la violation de l’employeur à son obligation de prévention du harcèlement

Publié le : 27/02/2023 27 février févr. 02 2023

Dans son arrêt du 23 novembre 2022 n°21-18951, la Cour de Cassation précise que « l’obligation de prévention du harcèlement moral, qui résulte de l’article L1152-4 du Code du Travail, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l’article L1152-1 du même code et ne se confond pas avec elle. »
On rappellera en effet que « L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral. » (art. 1152-4)

Et « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. » (art 1152-1)

L’employeur a donc deux obligations distinctes : celle de prévenir les faits de harcèlement, et celle de faire cesser les faits qui surviennent.

En l’espèce, un salarié avait dénoncé auprès de son employeur des faits de harcèlement moral. Ce dernier n’avait pas réagi. 

Licencié pour faute grave par son employeur quelques mois plus tard, le salarié saisit le Conseil de Prud’hommes pour faire annuler son licenciement en raison du harcèlement moral qu’il estime avoir subi, et obtenir la condamnation de l’employeur pour harcèlement moral et pour violation de l’obligation de prévention  du harcèlement moral.

Le Conseil de Prud’hommes rejette la demande de nullité du licenciement et le déboute de ses demandes relatives au harcèlement moral.
Le salarié va faire appel du jugement.

Sur la question du harcèlement, la Cour d’appel va confirmer le jugement en estimant que 
" la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée. Les demandes relatives au harcèlement, à la prévention des actes de harcèlement moral et au licenciement doivent par conséquent être rejetées."

A tort selon la Cour de Cassation qui va considérer, au visa de l’article L1152-4 du Code du Travail, que 
« En statuant ainsi, alors que le salarié faisait valoir dans ses conclusions qu’il avait dénoncé le 21 juillet 2016 auprès de son employeur des agissements de harcèlement, sans réaction de celui-ci, et formait devant la cour d’appel une demande de dommages et intérêts distincte pour violation de l’obligation de prévention du harcèlement moral, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »

La position de la Cour est très claire : l’absence de faits avérés de harcèlement moral ne signifie pas que l’employeur a respecté son obligation de prévention du harcèlement et ne prive donc pas le salarié de solliciter des dommages et intérêts sur le fondement de cette violation.

Elle insiste d’ailleurs sur le fait que l’employeur n’a pas réagi suite au courrier du salarié.

Cela permet de rappeler qu’en cas de dénonciation de harcèlement moral, l’employeur a l’obligation de réagir sans tarder pour faire la lumière sur les faits. La Cour de cassation l’a rappelé à plusieurs reprises, l’employeur doit mener une enquête interne. Si cela vous arrive, n’hésitez pas à confier cette enquête à un Avocat.


Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

Magalie MARCHESSEAU LUCAS
Avocate Associée
AVOCADOUR - membre du GIE AVA
Pau (64)
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