Retrait autorité parentale

Retrait de l’autorité parentale : privation automatique des droits de visite

Publié le : 04/12/2025 04 décembre déc. 12 2025

Cass. 1re civ., 1er octobre 2025, n° 24-10.369
Dans cette affaire une juridiction pénale avait ordonné le retrait de l’autorité parentale d’un père, en raison des faits de violences et de harcèlement commis à l’encontre de la mère de leur enfant.
A la suite de cette décision pénale, la mère de cet enfant a saisi le juge aux affaires familiales d’une demande de retrait de l’autorité parentale, sollicitant que la résidence de l’enfant soit fixée à son domicile sans droit de visite et d’hébergement du père.

Par jugement du 26 avril 2021 le Juge aux affaires familiales s’est déclaré incompétent pour statuer sur le retrait de l’autorité parentale dès lors que la juridiction pénale l’avait déjà prononcée, et a fixé la résidence de cet enfant au domicile de sa mère avec un droit de visite au profit du père.

La Cour d’appel de Metz, saisie par la mère de l’enfant, a, elle, rejeté tout droit de visite du père, lequel a formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

Au soutien de son pourvoi, le père de l’enfant invoquait les deux arguments suivants :

- En application de l’article 371-1 du Code civil : « L'enfant a le droit d'entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l'intérêt de l'enfant peut faire obstacle à l'exercice de ce droit. »
- Le lien de filiation entre un père et son enfant doit permettre l’octroi d’un droit de visite, même privé de l’autorité parentale, sous réserve de l’intérêt de l’enfant. 

Deux questions étaient ainsi posées à la Cour de cassation :

- Le retrait de l’autorité parentale prive-t-il automatiquement le parent concerné de tout droit de visite à l’égard de son enfant ? 
-  Le père ou la mère faisant l’objet d’un retrait de l’autorité parentale, est-il un ascendant au sens de l’article 371-4 du code civil ?


Pour la première fois, venant combler un vide juridique, la Cour de cassation considère que la décision de retrait total de l’autorité parentale prive automatiquement le parent concerné de tout droit de visite à l’égard de son enfant.

Elle précise également que les père et mère ne sont pas des « ascendants » au sens de l’article 371-4 du Code civil.
 

I- Rappel des contours de l’autorité parentale : distinction entre titularité et exercice

Défini par l’article 371-1 du Code civil, il s’agit d’un « ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’enfant ».

Ces droits et devoirs sont qualifiés d’attributs de l’autorité parentale.

Il s’agit notamment des droits et devoirs de garde, de surveillance, et d’éducation. Chaque parent doit également assureur la sécurité morale, psychique et matérielle de ses enfants.

Il y a lieu de distinguer :

- Le retrait de l’exercice de l’autorité parentale (exercice exclusif de l’autorité parentale) : le parent qui ne peut plus exercer l’autorité parentale en demeure toutefois titulaire. Il conserve par conséquent le « socle des droits qui sont attachés à cette titularité » dont « le droit de consentir au mariage, le droit de consentir à l’adoption et à l’émancipation de son enfant mineur » (Rapport du Conseiller Mme Marilly, Conseillère Référendaire à la Cour de cassation, assistée par le SDER, sur l’arrêt commenté).

- Du retrait de l’autorité parentale : le parent concerné n’est plus titulaire de cette autorité. Il est donc privé de l’ensemble des droits attachés à l’autorité parentale.
Ce retrait peut être ordonné par une juridiction pénale ou par le juge aux affaires familiales, application respectivement des articles 378 (infraction pénale commise sur la personne de l’enfant) et 378-1 du Code civil (mauvais traitements, consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques, usage de stupéfiants, inconduite notoire, enfant témoin de pressions ou de violences d’un parent sur l’autre, défaut de soin, si cela met en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l’enfant).

II- Conséquences du retrait total de l’autorité parentale : privation automatique des droits de visite et d’hébergement

Ils découlent du droit fondamental au maintien des relations personnelles entre un enfant et ses parents résultant notamment de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Ces droits sont ceux des parents mais également des enfants.

Le retrait de l’exercice de l’autorité parentale (c’est-à-dire en cas d’exercice exclusif de l’autorité parentale) ne prive pas le parent concerné de ses droits de visite et d’hébergement qui ne peuvent lui être retirés que pour des motifs graves, en application de l’article 373-2-1, alinéas 2 du Code civil.
En revanche, la loi ne prévoit pas les effets du retrait total de l’autorité parentale sur les droits de visite et d’hébergement.

La Cour de cassation va donc puiser sa solution dans les travaux parlementaires afférents aux lois n°2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, et n°2024-233 du 18 mars 2024 visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et co-victimes de violences intrafamiliales, selon lesquels en cas de retrait total de l’autorité parentale le parent sanctionné « n’a plus le droit de garder l’enfant, de surveiller son entretien et son éducation, ou de consentir à son émancipation, son adoption ou son mariage, ni de gérer son patrimoine ».

Dans ces travaux les droits de visite et d’hébergement sont qualifiés d’attributs de l’autorité parentale.
La Cour de cassation, particulièrement pédagogue, en conclut que le retrait total de l’autorité parentale entraîne pour le parent concerné la perte automatique de son droit de visite.

Elle précise que cette sanction est conforme à l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales relatif au droit au respect de sa vie familiale, considérant que le but légitime de protection de l’enfant, victime directe ou indirecte de violences intrafamiliales ou mis en danger du fait de ses parents.

Tout en rappelant qu’il s’agit d’une « mesure ultime ».


Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

Bastien AUZUECH
Avocat Associé
2A Avocats Aoust & Auzuech
RODEZ (12)
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